Préambule

Les coupures de journaux entre 1922 et 1926 relatent l’activité pétrolière en France.

Journal de Saint-Gaudens du 21 octobre 1922 (article de M.Abadie) : en 1920, une société américaine avait acquis des droits temporaires sur des terrains du village de Lespugne en vue d’extraction de pétrole ; les travaux ne furent jamais entrepris ! A ce moment, la presse méridionale et parisienne s’intéresse à la découverte du Chanoine Estinès, permettant la prospection minière par perception de radiations émanant des gisements. Cette nouvelle méthode fut inventée quatorze ans auparavant, mais le Chanoine Estinés garda secrète sa méthode.

Le Télégramme en 1922 interviewe le chanoine qui déclare que la région Sud-Ouest Pyrénées est “toute entière riche en pétrole” ! Les travaux de l’éminent géologue Leymerie l’ont inspiré dans ses recherches. Sa méthode comprend :

  • un appareil portatif avec lequel il va sur le terrain, qui lui indique où se trouve le pétrole d’après les radiations de ce corps et,
  • un appareil très lourd qui lui indique la profondeur exacte du gisement grâce à des courants électriques, opération difficile, mais grâce à une nouvelle propriété de la radioactivité, on obtient automatiquement et sans erreur la profondeur de la première couche de pétrole. Ses pronostics sont d’une extrême précision. Il parle d’une nappe de pétrole à Sainte-Suzanne (près d’Orthez), à Gabian (au nord de Béziers) dans les Cévennes, etc. A Gabian, les sondages furent implantés sur le site par les ingénieurs des Mines parce qu’un filet de pétrole  coulait depuis 200 ans et ce pétrole était vendu en pharmacie sous le nom « d’huile de Gabian ».

La Petite Gironde du 10 décembre 1924 : la méthode du chanoine a été présentée dans le journal l’Oeuvre du 8 novembre 1920. Découverte de Castagnède (à côté de Carresse, près du gave d’Oloron) où le pétrole a “jailli” à 220 mètres de profondeur.

La Petite Gironde du 12 décembre 1924 :

  • La Société de Recherche d’Hydrocarbures qui a fait le sondage de Coutets n’a trouvé que gypse et marnes à -175 mètres.
  • Le Pétrole National, sur le sondage de Castagnède, à  -220 mètres, a observé un jaillissement, mais ce n’était qu’une projection de gaz et d’eau huileuse, témoignant du voisinage d’un horizon hydrocarburé. Le Journal de Saint-Gaudens en attribuait le mérite au chanoine mais l’ingénieur Pourbaix signalait avoir prévu cette découverte trois ans auparavant !
  • Le Syndicat Lestage a trouvé une projection identique à celle de Castagnède mais un deuxième forage ne trouva qu’un gisement de chlorure de potassium.
  • La Société de Recherches et d’Exploration de Pétrole en France va prospecter au nord-ouest, région de Carresse-Cassaber. Un propriétaire de Jurançon (près de Pau) a demandé un permis exclusif. En 1925, les travaux dans le sud-ouest porteront sur une quinzaine de points.

Pour en revenir au Chanoine Estinés, ce dernier,  aussi bien dans la presse que dans ses lettres, ne donna que fort peu de renseignements sur ses appareils et sa méthode infaillible ! Toutefois, dans une lettre de 1925, il cite le procédé Schlumberger toujours utilisé de nos jours. Il parle aussi d’une machine “Rotary foreuse américaine qui travaillait à Sainte-Suzanne et avançait rapidement, appartenant à la Compagnie Générale des Sondages, travaillant  pour la Société Le Pétrole de France, filiale du groupe belge Empain. Il mentionne aussi des appareils pour prospecter le pétrole tel l’appareil de Courrier identique à celui d’Alfred Régis (connu il y a 15 ans). La différence entre les deux étant que :

  • le premier suspend la caisse à son cou alors que,
  • le second la fait porter par sa femme !

Après 1926, l’ère du modernisme arrive.

Cette période des années 1920-1926, couvre une petite partie de la recherche pétrolière du début de notre siècle. Recherche qui avait en réalité débutée à la fin du XIXéme siècle en Aquitaine où des notables locaux réalisèrent une trentaine de forages entre 1896 et 1926, forages pouvant atteindre 750 mètres de profondeur. La présence d’indices d’hydrocarbures a bien été reconnue à cette époque, mais les résultats des forages furent très décevants, d’où l’arrêt de l’activité d’exploration liée aussi à la crise économique de 1930 et à la chute du prix du brut. Il faut ajouter que les profondeurs auxquelles parvenaient ces sondages anciens étaient incompatibles avec la présence d’un gisement pétrolier : le gaz de Saint-Marcet a été découvert entre -1.700 et -2.500 mètres, l’huile de Lacq (Lacq supérieur) vers -1.000 mètres et le gaz de Lacq (Lacq profond) entre -3.500 et 4.000 mètres.

Il faut dire aussi que le pétrole se trouve avec tout un ensemble de données géologiques, géophysiques et une connaissance approfondie du forage, parfois aussi avec un peu de chance !

En fait, la reprise de l’activité pétrolière en France n’eut lieu qu’en 1936.

(Article de Janine Reulet : Recherche de pétrole et avatars d’un chercheur trop modeste)

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