Comment a été choisi l’emplacement du premier puit de la découverte de Saint-Marcet : le SM1

(article de Claude Poumot/APETRA)

a)_Un peu d’histoire :

Au XVème siècle à Pechelbronn ;

Les paysans écopaient l’huile à la surface de l’eau pour l’utiliser à des fins thérapeutiques et pour graisser leurs outils et roues de charrettes.

En 1772 à Pechelbronn :

La famille Le Bel se trouvait être la seule concessionnaire à exploiter et à vendre du bitume.

En 1873 à Pechelbronn :

La première raffinerie produira du pétrole lampant appelé “huile blanche”, à partir de sable pétrolifère.

Le 20 Janvier 1921 dans le “Républicain Libéral”.

On nous écrit de Lespugue :…… “Ce n’est pas une vision de cinéma, ni même une information fantaisiste quoique la plus inattendue; il y aurait du pétrole dans notre région ! Des ingénieurs américains spécialistes, conduits par des inductions scientifiques sur la constitution géologique de notre pays y avaient séjournés plusieurs mois et après avoir procédé à quelques analyses ont décidé d’entreprendre des travaux. A cet effet, tous les habitants vont être invités à signer des polices accordant à une société d’exploitation le droit de passage sur leurs terres et le droit de forage de puits moyennant une somme forfaitaire à l’hectare”…….

En décembre 1924 dans le “Républicain Libéral”.

Informations – Du pétrole dans les Pyrénées :

……  “La durée du contrat était de trois ans, elle est aujourd’hui expirée sans que les travaux  aient été entrepris. Les géologues venus d’Amérique, n’ont-ils pas osé ?”….

Le 26 février 1927 dans le « Républicain Libéral ».

Chronique régionale et locale – Le pétrole en Comminges :

….. “L’on a appris sans étonnement qu’un permis exclusif de recherches de pétrole et de gaz combustibles avait été accordé le 7 février dernier à M. Casterés sur un périmètre délimité englobant les communes de Blajan, Lespugue, Charlas, Saman, Montgaillard, Ciadoux et Saint-Pé-del Bosc. Le nouveau Syndicat – car on constitue toujours des Syndicats pour le forage de puits de pétrole – sera-t-il plus heureux ? C’est à souhaiter, mais constatons que depuis le commencement des travaux sur tous les points de la France et particulièrement dans les Pyrénées on est allé de déception en déception. Seul Gabian (Hérault) dans un de ces puits a fourni un jet assez abondant, mais nulle part le précieux liquide ne s’est trouvé en quantité exploitable”……….

Le 5 septembre 1927 :

Les premières mesures électriques sont faites dans un sondage alsacien. Le carottage électrique était né, il devait être par la suite une véritable révolution dans toutes les recherches faites par sondage.

En 1936 : La Société Anonyme d’Exploitation Minière (SAEM) achète une puissante machine “Rotary” américaine qui permit de faire des forages à 2.000 mètres.

En 1936, 1937, 1938, 1939.

Avec l’expérience de Pechelbronn, et en sachant que des indices de pétrole sont assez nombreux au nord des Pyrénées, les géologues et les sociétés de forages espéraient trouver du pétrole dans cette partie méridionale de la France. De plus, la recherche du pétrole dans une zone située en bordure d’une chaîne de montagne ressemblait aux gisements de Californie, d’Irak et même aux Indes Néerlandaises (aujourd’hui l’Indonésie).

Elle porta donc son choix sur le nord des Pyrénées.

En effet, le bassin d’Aquitaine a été comblé par des sédiments provenant de l’érosion des Pyrénées et ces séries sédimentaires ont été plissées en formant des rides dont l’amplitude décroît avec l’éloignement de l’axe de la chaîne. Ainsi les formations génératrices d’hydrocarbures ont certainement alimentées d’énormes réservoirs dans ces plissements ou anticlinaux. En conséquence les bitumes et les suintements d’huile observés en surface proviennent d’anticlinaux soit décapés par l’érosion, soit ouvert par des failles, et ils ne sont plus étanches. Mais ils indiquent quand même l’existence d’un gisement et sa disparition progressive.

La commission des géologues élimina :

  • la partie occidentale de la bordure Nord-Pyrénéenne, déjà forée sans succès malgré ses nombreux indices et,
  • la partie orientale trop riche en massifs cristallins.

La commission sous l’impulsion de C. Jacob demanda d’entreprendre les forages le plus à l’ouest possible vers les confins du plateau de Lannemezan, pour essayer  de se rapprocher des indices connus (Saint-Boés près d’Orthez et en Chalosse).

La lisière nord des Pyrénées est séparée en deux parties par le plateau de Lannemezan, où le Miocène transgressif mord sur la bordure de la chaîne et masque les structures et les terrains plus profonds. Ils fixèrent leur choix sur la partie moyenne dite des “Petites- Pyrénées” (entre la Garonne et l’Ariège) où les conditions les plus favorables sont réunies. En effet des dépôts de roches poreuses du Jurassique supérieur (dolomitiques et calcaires) sont surmontés par des marnes Aptien et Albien dépassant 1.000 mètres d’épaisseur jouant le rôle de couverture. Cet ensemble ayant subi les plissements de l’Éocène supérieur lors de la formation des Pyrénées, avait fait naître des anticlinaux particulièrement développés à Aulon-Saint-Marcet, Proupiary, Saint-Martory, Gensac, Aurignac, Plagne, et Richou, qui paraissaient propices à l’accumulation du pétrole.

Le premier forage fut implanté sur la structure anticlinale d’Aulon-Saint-Marcet, c’est-à-dire dans la partie occidentale des Petites Pyrénées le plus près possible des indices du Béarn. Il fut préféré à une implantation sur la structure de Gensac sur laquelle le recouvrement Miocène ne permettait pas d’être assuré d’une fermeture en profondeur.

b) Premier Forage d’Aulon/Saint-Marcet : SM1

20/01/1939:Le forage commence sur l’anticlinal d’Aulon/Saint-Marcet sur la colline du Pinat.

23/05/1939:Une première venue de gaz de faible débit 100 lit/min. est apparue entre les colonnes 18, 5/8 et le 9.

02/06/1939 : Reprise du forage en 7.

05/06/1939 : Après avoir traversé 1.400m de marnes Sénoniennes (Crétacé Supérieur), le forage rencontra une brèche dolomitique d’âge vraisemblablement Cénomanien renfermant du gaz. Le fond étant à -1.531 m, il y eut un début d’éruption. La pression sous le “shaffer” (vanne) monte à 59kg/cm2 d’où l’injection de 73m3 de boue de densité 1,35.

10/06/1939 au 17/07/1939 : Des essais ont lieu dans la zone située entre -1.508 et -1.530 mètres.

Nuit du 13 au 14 juillet 1939 :

Un débit de gaz de 180 000m3/jour est  enregistré avec une pression de150kg/cm2 en surface.

17 juillet au 14 septembre 1939 : Arrêt des essais et du forage pour congés du personnel et pour mobilisation sous les drapeaux car c’est la déclaration de guerre.

22 avril 1940 au 04 mai 1940 : Essais de mise en production par les tiges de la zone située au-dessus de -1.600 m.

04 mai 1940      : Arrêt des essais.

16 mai 1940      : Démontage du derrick. C’est la guerre !

20 janvier 1942 : Remontage du derrick. C’est l’occupation !

06 juin 1942 au 15 septembre 1943 : Reprise du forage, puis arrêt à -2.300 m. dans une formation d’anhydrite du Trias. Il avait traversé à 1.840 m. une dolomie jurassique qui donna un pétrole brut de toute première qualité (22 % essence, 12 % de lampant, 12 % de gas-oil, 4 % de paraffine, et 50 % d’huile de graissage).

c) Région des Petites Pyrénées

Sur l’ensemble des structures anticlinales, 39 forages ont été réalisés, dont 19 avec du gaz et 2 avec du gaz et du pétrole.

En particulier sur la structure d’Aulon-Saint-Marcet, 14 forages dont 2 stériles ont été forés : 1 sur la structure d’Auzas, 1 à Proupriary qui a donné du gaz, 1 à Saint-Martory, 1 à Richou, 2 à Aurignac, 3 à Gensac dont un a terminé à -3.090 m (C’est le record de France pour l’époque ; le record du monde étant à 4.950 m au USA), 2 à Plagne et 1 à Puymaurin implanté pour la première fois sur des donnés géophysiques car les séries recherchées sont recouvertes de dépôts importants de Miocène.

Malgré l’absence de moyens techniques, utilisés couramment de nos jours, cette découverte montre que les considérations scientifiques de l’époque s’avérèrent justes.

Cette histoire de la découverte du gaz de Saint-Marcet constitue une étape industrielle prépondérante pour le développement de l’industrie pétrolière française et plus particulièrement pour l’Aquitaine.

Lien Permanent pour cet article : http://bregail.com/edito-2009/saint-marcet/emplacement-du-premier-puit-sm/